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Arnould Massart : L'instinct des sons - Entretien Isabelle Françaix

 

Qui est Arnould Massart ? Compositeur de musique contemporaine, de jazz, de variété française, féru des rapports entre le rythme et les figures géomantiques à travers la transe, diplômé en Nada Brahma Music Therapy, fondateur et professeur des Ateliers du Rythme à Bruxelles… il investit avec une vivacité intuitive chaque perspective nouvelle qui s’offre à lui, disponible à l’inédit pourvu qu’instinctivement il résonne en lui. Loin de se disperser, bien au-delà des étiquettes des musicologues, il prend des raccourcis vers « quelque chose d’un autre ordre » sans soumettre la musique à une grammaire ni un visage uniques.

Arnould Massart, lorsque je vous ai appelé pour cet entretien autour de la musique contemporaine, vous m’avez répondu que je me trompais certainement de personne. Pourquoi ?

La composition dans la musique contemporaine est loin d’être mon activité principale. J’en faisais davantage avant. Je ne suis pas un compositeur avec un système ni un langage, en tout cas, je ne me définis pas comme tel.

Comment décririez-vous la musique contemporaine, puisque vous vous définissez en dehors ?

Il ne s’agit pas d’une définition, mais bien d’une mise en perspective. Je n’en fais pas beaucoup. Ce n’est pas de ça que je vis.

 

Maintenant, si vous y tenez, je donnerais donc de la musique contemporaine une définition extérieure, plutôt sociale. Elle est pratiquée par des musiciens à la recherche d’un idiome personnel qui sont, dans la lignée de la deuxième École de Vienne (weberniens, bouléziens, et bien d’autres arborescences dans les vingt dernières années), continuateurs d’une approche de la composition qu’ils ébauchent,  expérimentent ou développent. En s’affirmant dans une démarche de recherche novatrice, ils s’efforcent de découvrir de nouveaux moyens d’expression musicale, basés, il est vrai, sur les mêmes ingrédients sonores, combinés différemment afin, d’un côté de communiquer leurs impressions et affects, de l’autre de constituer une construction sonore reflétant une certaine vision ou structure du monde… Xenakis s’inscrit, par exemple, du côté de la réflexion, d’une recherche structurale. En face, on trouvera, par exemple, l’école timbrale, qui fait davantage appel à la sensorialité.
 

Dans la plupart des cas cependant, le public attend du compositeur de musique contemporaine qu’il soit capable, non seulement d’expliquer ses intentions, mais aussi d’exposer ses processus compositionnels et leur raison d’être.

Comment vous inscrivez-vous dans ce paysage ?

C’est compliqué. Quand je compose une pièce de musique contemporaine, j’ai la chance de bénéficier d’une grande liberté. Je ne suis pas obligé de m’inscrire dans un langage particulier comme c’est le cas quand je dois composer une pièce de jazz. La frontière entre ces deux mondes est un fil de rasoir sur lequel je navigue depuis une bonne vingtaine d’années. Je connais le problème d’un côté comme de l’autre. On ne m’a jamais reproché d’être trop jazz en musique contemporaine ; au contraire, on semble plutôt attendre de moi que j’exprime une influence que j’essaie cependant de ne pas trop laisser filtrer. En jazz, par contre, on m’a souvent reproché d’être trop « contemporain »….

 

Je peux donc faire dans le contemporain un tas de choses que je ne peux me permettre ni en jazz ni dans les arrangements pour la chanson française qui sont très contraignants, même si, dans ces deux domaines, les codes ne cessent de changer et de rechanger.

 

En musique contemporaine, les contraintes, c’est sans doute moi qui me les impose. Cela dit, il existe un certain nombre de choses que je ne peux pas me permettre… Prenons un exemple concret : jouer un accord parfait majeur. La façon dont j’ai été éduqué avec Maurizio Kagel m’a donné une lecture presque conceptuelle de ce type d’objet. Cela n’est pas toujours bien compris. Là, on touche à un des problèmes de fond de la musique contemporaine : la nécessité pour le compositeur d’expliquer sa démarche afin que le public puisse écouter l’œuvre dans cette perspective. Une orientation de l’écoute est presque incontournable.

 

Si je joue do majeur pendant 15 minutes, il faut que j’explique pourquoi ! Sans ça, on s’empressera de dire que je fais n’importe quoi. C’est juste un exemple… jouer do majeur pendant de longues minutes n’est pas vraiment ma tasse de thé…

 

Se créer des contraintes, c’est stimulant. J’aime bien cela dans la perspective de découvrir, d’inventer de nouvelles solutions. J’ai écrit plusieurs fois des pièces pour des films muets destinés à être projetés au Musée du Cinéma. Je me suis inventé un système pour l’un d’entre eux. C’est amusant de se fixer un système et de se dire : « Avec ça, je dois arriver à exprimer ce que je veux. »

J’ai l’impression que vous me parlez d’un jeu avant tout…

La déesse de la Créativité n’est-elle pas également celle du Langage et du Jeu ?

À un moment donné vous avez fait un choix pour que votre temps soit moins disponible pour la musique contemporaine ?

Je ne pense pas… Pas tellement. C’est un peu comme si j’avais fait de l’auto-stop sur plusieurs routes en même temps, et je suis parti là où une voiture m’a pris. Le premier véhicule, ça a été la chanson française. Ce n’était pas une intention : « Pourquoi pas ? » Mes raisons étaient extramusicales. Et puis, cette voiture n’a jamais dû faire le plein d’essence et ça a continué. Maintenant, j’en suis pratiquement sorti.

 

Je n’ai pas trop réfléchi.  J’avais juste envie de m’impliquer activement dans la musique !

 

Dès que j’avais un peu de temps, je composais – ce qui explique que beaucoup de choses restent inachevées dans mes tiroirs. Quelqu’un m’appelait en urgence ; j’interrompais mon travail et quand je tentais de le reprendre, je n’étais plus le même. Il ne m’est pratiquement jamais arrivé de continuer quelque chose que j’avais commencé et arrêté. J’imagine que c’est la même chose pour tous les compositeurs : on est dans un état second quand on compose,  affreux d’un point de vue social et familial; on n’écoute plus les gens qu’à moitié. En toile de fond, ça tourne sans arrêt. On reste dans cette énergie-là. Mais, dès qu’on la brise, elle se dissipe et disparaît à jamais. Ce n’est plus vrai alors de continuer dans cette voie.

 

Ce que j’écris a toujours été davantage le reflet d’un état que celui d’une pensée ou d’un système. J’ai toujours dû aller très vite sinon je perdais cet état. Du reste, ce n’est pas ma nature d’analyser posément un travail abandonné et de le reprendre. C’est comme acheter un billet pour une destination où l’on n'a déjà plus envie d’aller.

Est-ce que cela a à voir avec la notion de rythme intime que vous défendez ?

Sans doute… Je n’y avais jamais pensé sous cet angle-là. Pour moi, la notion de rythme intime se réfère à nos manières différentes d’être au monde. Elles se révèlent dans la façon dont on parle, dont on marche, dont on interagit, dont on écoute ou pas… Je n’ai jamais réfléchi au rythme de l’humeur, par exemple, qu’on pourrait mettre en rapport avec la lune, relativement rapide, puisqu’elle fait un tour complet en plus ou moins 28 jours.

 

Pour revenir aux bifurcations dans mon activité professionnelle, elles résultent de contingences matérielles évidemment : il faut bien gagner sa croûte ! J’ai la chance de pouvoir vivre de la musique, mais, pour cela, j’ai aussi dû accepter ce qu’on me proposait. Bien sûr, on pourrait me rétorquer qu’il s’agit quand même d’un choix… Pas un choix cependant pareil à celui qui résulterait d’une réflexion sur l’orientation à donner à ma vie. Je savais que je ferais de la musique, mais laquelle… ?

Comment ressentez-vous cette multiplicité ? Comme une dichotomie ou une unité dans votre travail ?

Cela reste principalement inconscient. Pour moi, c’est un grand mystère. Ma mère est pianiste et mon père n’était pas du tout musicien. À 8 ans, j’ai demandé, fin septembre, à étudier à l’Académie de musique. J’y suis allé et me suis fait houspiller parce que j’avais raté les premiers cours. Rentré à la maison, mon père m’a dit que l’Académie n’était pas obligatoire comme l’école, et que si je le souhaitais, je pouvais arrêter. Pourtant j’ai continué. Ça reste un grand mystère pour moi… Cette anecdote va très loin. Il y a toujours eu quelque chose en moi d’intimement lié à la nature de la musique. Je trouve dans les sons et leurs combinaisons un sens énorme, très profond... À partir du moment où les sons s’agencent d’une certaine manière ou d’une autre encore, le sens émerge, ça veut dire quelque chose, même si ça reste inexprimable par des mots !

 

On peut comparer ce phénomène à la phonétique. Avec un nombre fini de phonèmes, on construit des vocables qui acquièrent un sens que l’on dit arbitraire. En fait, c’est beaucoup plus compliqué. Prenez les onomatopées : là, il existe un rapport entre la séquence phonétique et l’objet, l’être, le mouvement ou que sais-je, auquel elle se réfère. Prenons les expériences faites dans les années 60 : des suites de phonèmes sans signification sont soumises à des natifs de langues différentes à qui on demande de choisir si ces mots désignent des objets anguleux ou ronds, petits ou grands. Tous s’accordent plus ou moins quant à savoir quels mots désignent quelles qualités. Il y a donc quelque chose sur lequel on n’a pas encore réussi à mettre le doigt. À l’Université, j’aurais voulu faire mon mémoire sur ce sujet, mais mon prof n’était pas d’accord….

 

Il existe dans les sons des choses homologues à ce qui se passe en nous. Quand je les entends, ça déclenche quelque chose en moi – sur un plan physique ! Ainsi, travailler, réagir, manipuler des sons, c’était pour moi une manière de me sentir vivre. Comme j’en ai sans doute énormément besoin, j’ai accepté toutes les possibilités de les utiliser au-delà des genres, des styles et des chapelles ! Les étiquettes, je m’en moquais complètement, mais j’ai bien été obligé de vivre avec puisqu’on m’en collait…

 

Il y a des liens fondamentaux entre nos processus biologiques, kinesthésiques ou moteurs et les rythmes. C’est évident ! À partir du moment où la sensibilité est éveillée – de naissance ou par stimulation – à ce phénomène-là, il prend un sens incroyable. Écouter et réagir, c’est faire résonner une partie de soi. On ne peut faire résonner ce qui n’est pas en soi.

 

Voilà le mystère : comment se fait-il que les sons connaissent chez moi un sens tellement fort alors que, pour certains, ils n’en ont pas du tout ? Chez moi, c’est viscéral.

 

C’est la raison pour laquelle depuis 20 ans, j’ai énormément travaillé sur la thérapie par les sons.

 

J’ai étudié avec un Indien la thérapie Nada Brahma, tandis que j’entreprenais simultanément plusieurs formations aux États-Unis. Je ne suis pas thérapeute et ce n’est pas mon but. En reconnaissant la valeur du domaine de la thérapie par les sons et les musiques, on reconnaît qu’il existe un lien entre des processus vitaux psychologiques ou physiologiques et le monde sonore. On essaie alors d’établir des correspondances pour que cela devienne un outil. Mais ce n’est pas pour soigner les gens que j’étudiais toutes ces matières. C’était plutôt une quête personnelle pour me connaître.

Comment cela influence-t-il votre composition ?

J’ai fait un disque sorti aux États-Unis sur lequel il y a deux pièces : l’une travaille sur l’anxiété préopératoire et l’autre sur le réveil postopératoire. Ce CD n’est pas seulement utilisé à l’hôpital ; il l’est aussi en massage, en relaxation, en psychothérapie, en soins palliatifs…

 

Dans ce projet, la préoccupation esthétique n’est pas prioritaire. Il ne s’agit pas de faire du beau, d’exprimer des émotions, ni de faire vivre une situation ou de mettre un système à l’épreuve. C’est un accompagnement pour le patient et sa famille.

Fort de cette connaissance, quand vous entendez de la musique contemporaine, comment résonne-t-elle ?

Vous relancez une question qui était : comment est-ce que je compose depuis que je suis conscient de ce phénomène-là ? Je suis beaucoup plus attentif à l’effet de la musique sur chacun de nous. Je donne cours d’harmonie et de rythme et il m’arrive régulièrement de dire à mes étudiants : « N’oubliez pas que, dans le métier de musicien, vous faites aussi de la musique pour les autres. »

 

On la fait pour soi-même, bien sûr. Mais on envoie aussi des énergies sonores sur les gens et je ne veux pas envoyer n’importe quoi sur n’importe qui. Quand j’écoute des musiques, je suis plus conscient qu’avant des raisons pour lesquelles elles m’affectent. Et je l’accepte davantage – ce qui ne veut pas dire que je les subis !

 

À 20 ans, j’ai réagi violemment à des musiques qu’on me disait intéressantes et que je trouvais horribles. Je me forçais à franchir le cap, puisque c’était intéressant ! Maintenant, non. Je ne franchis plus le cap si une musique me plonge dans un état que je veux éviter.

 

J’ai toujours trouvé les concerts trop longs. Trop d’énergies différentes sont balancées au public. Ça donne un cocktail qui nous envahit en sollicitant le cerveau au-delà de ses capacités. Chaque morceau, chaque énergie se voit écrasée, chassée, effacée par les énergies des morceaux suivants. Quelle obstruction ! Quelle confusion ! Quel manque d’air !

 

Maintenant, en écrivant une musique, je ne peux plus ne pas me poser la question de l’effet qu’elle pourrait faire… Même si je me trompe.

Quel rapport entre la musique et la géomancie ?

La géomancie joue sur 4 niveaux, alors que le Yi-jing (NDLR : Le Livre des Transformations chinois, figurant 64 hexagrammes) joue sur 6. Au lieu d’une barre pleine ou brisée comme dans le Yi-jing, en géomancie deux cailloux fusionnent ou restent séparés. C’est un art divinatoire que je n’ai pas abordé comme tel mais comme répertoire de caractères humains, d’énergies. Graphiquement, on a 16 possibilités. En Afrique, ça s’appelle le Fa.

 

C’est arrivé dans les années 90. J’ai rencontré à Paris un médecin psychosomaticien qui approche aujourd’hui des nonante ans : Jacques Donnars. J’ai fait de la TTT (Terpsichore Transe Thérapie) avec lui pendant plusieurs années. C’était une technique collective assez violente. Quand il a appris que j’étais musicien, il m’a dit : « Vous êtes tout à fait la personne que j’attendais » et m’a invité à lire quelques livres en lien avec la géomancie et le Fa. J’étais, semble-t-il, depuis de longues années, le premier à réagir positivement.

 

Il était intéressant d’envisager le rythme par le biais de la géomancie. En voyant ces figures, Donnars avait eu l’intuition qu’il s’agissait de rythmes figés, pétrifiés en quelque sorte. Nous ne parlions pas des mêmes choses : le concept de rythme avait pour chacun de nous une résonance fort différente. Nous avons cependant réussi à entreprendre des démarches d’approche pour nous comprendre ou, du moins, communiquer valablement.

 

Ces figures géomantiques (puer le garçon, puella la fille, caput dragonis la tête du dragon, carcer l’emprisonnement, conjonctio, fortuna major, fortuna minor…) constituaient, selon lui, un système taxonomique d’énergies, un peu comme l’astrologie. Il était sûr que si on « sonorisait », « rythmisait » ces figures et qu’on les jouait à des personnes, on obtiendrait des réactions en correspondance avec ce qu’elles signifient. J’ai composé 4 pièces de 45 min en rapport, chacune, avec une figure spécifique, selon une mécanique qui invitait à la transe. La question était cependant : comment transposer ces figures en rythmes ? J’ai publié un long article sur ce sujet[1]. Les points doubles, par exemple, représenteraient une énergie statique et les points simples, impairs, une énergie dynamique… Mais c’est loin d’être aussi simple : je ne peux résumer cela en quelques mots.

Les musiques que vous avez écrites étaient-elles efficaces ?

C’est le grand mystère. Donnars en était convaincu. Moi curieux, intéressé et motivé. Parmi les 4 pièces, j’en ai composé une sur la figure de la « queue du dragon » (Cauda draconis). Lorsque nous l’avons expérimentée, deux hommes se sont battus. C’est la seule fois que cela s’est produit. Hasard ou correspondance ?

Cela nourrit-il encore vos compositions ?

Non. Cela dit, je les utilise parfois – à l’insu des gens – dans certains stages de rythme.  L’énergie qu’elles dégagent n’est jamais anodine…

 

La musique est d’abord une quête personnelle pour vous connaître vous-même, mais vous la vivez aussi dans un partage à vocation thérapeutique. Vous sentez-vous une mission ?

 

« Mission » est un bien grand mot ! Cela dit, je sens que je possède maintenant des capacités de traducteur que je n’avais pas avant. Je ne traduis pas d’une langue dans une autre (quoique cela m’arrive aussi), mais je tente de transposer en paroles l’expérience des rythmes, de nommer des correspondances, de jeter des ponts entre différents domaines de la conscience que sont la musique, la kinesthésie et le langage, par exemple.

La musique est-elle uniquement un moyen ou peut-elle être un but en soi ?

Non, elle n’est pas un but en soi. J’aurais pu dire le contraire il y a 20-30 ans car je manquais de recul. Aujourd’hui non. Pour moi, elle est un moyen, un outil, mais qui peut être beau, très beau. Il existe de belles faux, de beaux fléaux, de beaux marteaux, de belles charrues, de beaux ordinateurs… On peut se délecter à les regarder et apprécier à quel point ils sont bien pensés et bien réalisés.

 

Keith Jarrett  affirme en interview dans un film : « Musicians believe that music is made of music. » La musique n’est pas faite de musique : elle est faite d’autres choses ; c’est un réceptacle, un creuset, un véhicule…

Elle est un outil pour quoi ?

Multiple ! Un outil de délectation : qu’elle est belle ! Comme on le penserait d’une splendide console Louis XVI ou d’une superbe table marquetée.

 

Mais la musique est surtout un merveilleux raccourci pour nous mettre en contact avec quelque chose qui est d’un autre ordre. Et ce quelque chose est en nous, sinon rien ne résonnerait !

 

C’est une espèce de corde. Si elle est tendue dans l’univers et que je la touche d’un côté, quelqu’un d’autre recevra la vibration à l’autre bout du monde.

Quelles musiques vous emmènent-elles en raccourci d’un monde à l’autre ?

Il y a eu Mahler qui m’emmenait très fort à l’intérieur de moi. Aujourd’hui plus : j’ai changé… Debussy, en tout cas, depuis toujours ! Debussy reste un des compositeurs qui me parlent le plus tout en restant souvent complètement énigmatique et mystérieux. Jeux, par exemple, est une pièce éminemment mystérieuse.

 

Dans les plus contemporains, il y a John Adams ! Il m’est arrivé d’écouter Adams et de sentir plein de monde autour de moi !

 

J’adore Ligeti, mais c’est autre chose. Adams m’emmène ailleurs…

 

Récemment, j’écoutais Jonathan Harvey, que j’ai trouvé sublime. Mais il ne m’a pas emmené. Ça dépend sans doute de ma disponibilité.

 

Quand j’étais ado, je tapais un accord sur le piano et, pour moi, c’était une saison ; je changeais une note et c’était autre chose… Ce n’est pas simplement technique. C’est ce genre d’énigme qui me fait avancer et continuer.

Vous travaillez à une composition maintenant ?

Non ! Ou plutôt si : je prépare deux bouquins. J’ai besoin de m’exprimer, d’organiser le monde, que ce soit musicalement, pédagogiquement ou conceptuellement.

 

C’est un besoin créatif et si je ne peux pas le réaliser, je ne me sens pas dans mon assiette. Je pense qu’en moi, la sensibilité à la musique et le besoin créatif se sont rejoints, mais l’un ne doit pas nécessairement se manifester dans l’autre.

 

Propos recueillis par Isabelle Françaix, Bruxelles, décembre 2008.


[1]Geomancy and Rhythm. Inquisitive Lucubrations On A Hidden Correspondance. (Open Ear Journal. Vol. 1, 2 & 4 1997, Vol. 1 1998)

Photos : Isabelle Françaix. Télécharger les photos.